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Les assemblages japonais : entre tradition, ingéniosité et beauté

L'art de la menuiserie japonaise est intimement lié à l'histoire du pays, profondément ancrée dans la construction des temples, des sanctuaires et des maisons traditionnelles en bois. Ces techniques, héritées d’un savoir-faire ancestral, ont traversé les siècles et ont fini par conquérir le monde entier, inspirant ébénistes, artisans et designers contemporains.

Aujourd’hui encore, les assemblages japonais fascinent par leur précision, leur solidité et leur esthétique unique. Découvrons ensemble les principes, les types d'assemblages les plus emblématiques et les secrets pour les réaliser.

Bien choisir son bois

En menuiserie japonaise, le choix du bois est une étape capitale.

Pour l’architecture, on privilégie des essences tendres comme l’épicéa, le cyprès japonais (hinoki) ou le mélèze du Japon, réputées pour leur légèreté et leur résistance aux intempéries. Pour le mobilier et les petits objets, on se tourne plutôt vers des bois durs, tels que les fruitiers, qui possèdent un grain fin et une grande stabilité.

Le chêne, grâce à sa solidité, sa couleur homogène et sa résistance naturelle aux insectes, reste également un choix très apprécié, aussi bien au Japon qu’en Occident.

Le tenon avec cales affleurantes

Cet assemblage, inspiré du wari-kusabi, se caractérise par un tenon traversant bloqué par des cales visibles. Après avoir façonné la mortaise sur chacune des faces pour éviter les éclats, le tenon déborde et est ensuite fendu pour accueillir les cales.

Une fois celles-ci enfoncées à la bonne profondeur, l’excédent est scié puis arasé au rabot. Ce procédé offre une esthétique marquée, mettant en valeur la technique tout en assurant une excellente solidité.

Le tenon avec cales débordantes

Dans cette variante, les cales sont volontairement laissées en saillie, renforçant l’effet décoratif tout en maintenant la structure. Les rainures dans le tenon se terminent par un trou arrondi pour éviter toute propagation des fissures.

Ce type d’assemblage peut même être démonté, notamment lorsqu’il est réalisé avec de la colle animale traditionnelle. Chaque cale est ajustée pour créer un retrait uniforme et soigné.

L’assemblage papillon (arikata)

Rendu célèbre par le designer George Nakashima, le papillon japonais est utilisé pour stabiliser et réparer des fissures dans des plateaux massifs.

On commence par tracer la forme papillon, généralement à l’aide d’une fausse équerre réglée à 120°. Une fois débitée, la clé est utilisée comme gabarit pour reporter son empreinte sur la planche.

Les encoches sont creusées avec soin jusqu’à la profondeur finale, puis la clé est insérée en laissant un léger débord pour permettre un arasage parfait. Enfin, des traverses placées sous le plateau renforcent l’ensemble et évitent les déformations.

Les queues-d’aronde "tordues" (nejiri-arigata)

Les queues-d’aronde tordues sont une prouesse technique et visuelle. Utilisées dans la confection de boîtes ou de casse-têtes japonais, elles se distinguent par leur solidité exceptionnelle et leur aspect sculptural.

Pour les réaliser, on trace simultanément les queues et les contre-queues sur les deux pièces mises bout à bout. Une fois découpées et ajustées, ces queues s’emboîtent à 45°, créant un verrouillage mécanique quasi impossible à défaire même sans colle.

Les motifs en rayons de soleil

Inspirés du soleil levant, ces assemblages se caractérisent par des queues d’aronde disposées en éventail, se croisant en un point central.

Chaque angle est reporté sur les queues et contre-queues à l’aide d’une fausse équerre. Les pièces sont ensuite sciées, puis nettoyées minutieusement au ciseau à bois.

L’assemblage final se fait en serrant l’ensemble simultanément pour former une boîte solide et esthétiquement saisissante. Un léger chanfrein est ajouté pour finir, facilitant l’arasage et évitant les éclats.

La double queue-d’aronde en angle (kakushi-ari-kata-sanmai-hozo)

Ce type d’assemblage, utilisé pour relier deux traverses à un montant, combine solidité et élégance.

Les queues, avec un angle de ratio classique (1/8), s’emboîtent à 45° pour former un angle final à 90°. On trace d’abord la forme, puis on découpe soigneusement avant d’ajuster les épaulements.

Le montage final dévoile un motif symétrique raffiné sur le bois de bout. Cet assemblage est particulièrement impressionnant sur des pieds de table ou des cadres, apportant un effet visuel élégant tout en répartissant les charges.

Un savoir-faire au service de la beauté

Les assemblages japonais vont bien au-delà de simples techniques structurelles. Ils incarnent une philosophie où l’harmonie, la précision et le respect des matériaux priment. Chaque assemblage est pensé comme une œuvre d’art à part entière, où la main et l’œil de l’artisan dialoguent constamment avec le bois.

Ces techniques exigent patience, rigueur et sens du détail, mais elles offrent en retour des pièces uniques, à la fois robustes et poétiques.

Envie de vous lancer ?

Si ces assemblages vous intriguent, pourquoi ne pas essayer sur une petite boîte ou un cadre décoratif ? Vous découvrirez rapidement que le plus grand plaisir réside autant dans le chemin que dans le résultat final.
Rédigé le  8 juillet 2025 17:07 dans Techniques  -  Lien permanent

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